Hégésippe Moreau
En hommage à Odette Merlin (1901-1984)
qui a tant oeuvré pour les bibliothèques à Provins.
Parmi les manuscrits déposés par la Société d’histoire et d’archéologie de l’arrondissement de Provins (SHAAP) au Fonds ancien de la Bibliothèque municipale (1), se trouvent sept lettres autographes signées par Hégésippe Moreau (1810-1838) (2), écrivain, poète et journaliste ayant grandi et connu ses premiers succès littéraires à Provins (3). Ces lettres, qui ont été publiées dès 1890 par René Vallery-Radot (4), et plus récemment dans leur quasi-intégralité par Octave Vignon (5), ont rejoint en 2011 les autres autographes de Moreau conservés à la Villa Garnier (6). Les deux collections, celle de la Ville comme celle de la SHAAP, ont pour origine la famille Michelin (7). Le Docteur Maximilien Michelin (1788-1863), « admirateur d’Hégésippe Moreau » selon R. Vallery-Radot (8), fut un des premiers à colliger les copies de la correspondance de Moreau (9), et son fils Jules (1814-1891) (10), en charge de la Bibliothèque municipale de Provins après une carrière dans la magistrature, a poursuivi l’œuvre paternelle en la complétant notablement (11). Au printemps 2018, l’opportunité de compléter ce fonds s’est présentée avec l’apparition, à la fois sur le marché parisien traditionnel de l’autographe et sur une plateforme de vente en ligne bien connue, du poème intitulé « À l’occasion du passage de Charles X à Provins ». Sur notre proposition, et après l’accord du conseil d’administration de la SHAAP en date du 1er juin 2018 (12), le document a été acquis auprès de la Galerie Thomas Vincent, 53 rue Sainte-Anne, 75002 Paris, pour la somme de deux cent cinquante euros TTC, après négociation. Il s’agit d’une acquisition importante pour l’histoire locale, tant politique que littéraire.
Fig. 1. Laure Coutan-Montorgueil (1855-1915), Buste d’Hégésippe Moreau, biscuit de porcelaine. Provins, Manufacture de porcelaine Schaeffer, ca 1911 (Musée de Provins et du Provinois, Inv. MP 0081, © Ville de Provins.
Les autographes d’Hégésippe Moreau dans les collections publiques
D’une manière générale, les autographes d’Hégésippe Moreau sont rarissimes, collections privées et publiques réunies. L’érudit seine-et-marnais - et biographe de Moreau - Théophile Lhuillier en donne les raisons :
« Paresseux à prendre la plume, Moreau rimait à ses heures, selon la fantaisie de la muse, et se fiait à sa mémoire heureuse ; bon nombre des poésies imprimées qu’on a de lui ont été recueillies au passage par les amis auxquels il les récitait. Il a d’ailleurs peu vécu, peu produit. D’autre part, le goût des autographes n’était pas, de son temps, en honneur comme aujourd’hui ; comment aussi les amateurs eussent-ils songé à conserver des feuillets où s’alignaient les vers du poète malheureux et sans nom, qui allait s’éteindre à vingt-huit ans, ignoré de ses contemporains ! (13)»
Enfin, à cette rareté originelle il faut ajouter le fait que la plupart des autographes en mains particulières vers 1880 (14) et au milieu du siècle dernier (15) ne sont aujourd’hui plus localisés. Restent cependant accessibles les autographes des collections publiques suivants, présentés par ordre chronologique :
La lettre de la Bibliothèque municipale de Provins (Ms. 422)
Il s’agit du premier autographe connu, laissé à la postérité par Hégésippe Moreau enfant. Une lettre invitant Émile Guérard, le fils de la veuve (16) qui emploie sa mère comme femme de chambre, à la distribution des prix de fin de 3e au collège de Provins où Moreau est pensionnaire. Cette lettre, donnée à la bibliothèque municipale par la famille Guérard (17) en 1885, a été publiée par Armand Lebailly et Georges Benoît-Guyot avec quelques différences minimes (18). Nous la reproduisons ici fidèlement, fautes d’orthographe et d’accentuation comprises :
A Émile Guérard,
Ce 9 août 1820.
Monsieur,
Ex[c]usez-moi (sic) si je prends la liberté de vous écrire. Je ne suis pas un Démosthènes ou un Cicéron pour pouvoir écrire avec éloquence ou avec sagesse ; mais j’espère que vous excuserez la naïveté de mon enfance, car le simple but de ma lettre est de vous faire savoir que, si vous avez l’intention de venir a Provins pour la distribution des prix, elle est fixée au 17 aout. J’ai fait tous mes efforts pour mériter votre estime et votre bienveillance, et pour me rendre digne des bontés dont vous m’avez comblé jusqu’aujourd’hui.
Agréez, Monsieur, l’assurance du respect et de la soumission avec lesquelles j’ai l’honneur d’être
Votre très-humble
et très-respectueux
serviteur,
Moreau. »
H. Moreau, qui a dix ans en 1820, se distingue et reçoit, entre autres, le prix d’écriture. Prix on ne peut plus mérité, si l’on en juge par cette lettre qui révèle un certain talent de calligraphe.T. Lhuillier, qui a eu sous les yeux de nombreux exemples de l’écriture de Moreau, remarque à juste titre, que cette dernière « présente cependant des variations : soignée, fine et assez élégante dans ses lettres, moins régulière dans ses poésies, elle devient lourde et est formée de gros caractères inégaux sur les fragments manuscrits qu’on connaît du Diogène (19). »
La chanson de la Bibliothèque municipale de Provins (Ms. 422)
Donnée à la Ville en 1891 par le bibliothécaire Émile Bourquelot (20), la chanson intitulée « Couplets inspirés par l’arrivée du Roi à Provins en septembre 1828 »– est une des premières copies autographes de l’œuvre, selon O. Vignon (21), sinon la version originale. Elle ne peut être dissociée de l’acquisition qui vient d’être faite par la SHAAP, et qui, comme elle, doit être replacée dans le contexte de la visite du roi Charles X en 1828. Ce qui est fait plus bas. En voici le texte :
(Sur l’air « Le Dieu des Bonnes gens », de Béranger)
« Vive le Roi ; le char de la puissance
Passe escorté de ces souhaits trompeurs.
Le dévouement et la reconnaissance
Règnent partout, excepté dans les cœurs.
Que, d’un coup d’œil se disputant la grâce,
D’autres que moi rampent avec fierté ;
Seul, à l’écart, je murmure à voix basse :
Vive la liberté !
« Vive le roi ! s’écriaient les esclaves,
Qui de Xercès (sic) environnaient les pas ;
Un autre cri, dans la bouche des braves,
Faisait trembler ces indignes soldats.
De l’Archipel aux rives du Bosphore,
Après mille ans, l’écho l’a répété,
Et la Victoire a pour devise encore :
Vive la liberté.
« Vive le Roi ! De nos vieilles tourelles
Ce cri sinistre ébranle les créneaux
Quand les seigneurs faisaient, pour leurs querelles,
Au nom du prince, égorger les vassaux.
Dans ces débris où leur ombre guerrière
Agite encor son glaive ensanglanté,
Le voyageur écrit sur la poussière :
Vive la liberté.
« Vive le Roi ! La voix de la vengeance
Se perd toujours au bruit de ce refrain
Pour endormir son éternelle enfance,
Voilà comment on berce un souvenir
Mais quand la foudre éclate et le réveille,
Seul, sans flatteurs, le prince épouvanté
Entend ces mots gronder à son oreille :
Vive la liberté !
Par un Provinois. »
Les deux chansons des Archives départementales de Seine-et-Marne (Dossier Mdz 334)
Sous un même pli adressé au préfet de Seine-et-Marne par le sous-préfet de Provins (22) Simon, qui surveille étroitement les faits et gestes de Moreau, sont conservées « Halte dans la boue (23)» et « Les 5 et 6 juin 1832. Chant funèbre (24) ». La première des deux chansons (air : « Vaudeville du Charlatanisme (25)»), qui peut être datée de mars ou avril 1831, attaque violemment la politique européenne de Louis Philippe. Elle lui reproche notamment sa passivité face au soulèvement polonais contre la domination de la Russie, qui débute le 29 novembre 1830 et se termine en septembre 1831 (26). La seconde (air : « Où vont ces preux chevaliers », de Méhul), évoque les événements de la première insurrection républicaine sous la Monarchie de Juillet (1830-1848). Déclenchée à l'occasion des obsèques du général Lamarque, député de l'opposition, elle est matée par une terrible répression : les insurgés retranchés rue du Cloître-Saint-Merry sont en grande partie massacrés par la Garde nationale (27). L'épisode est immortalisé par Victor Hugo dans Les Misérables (28), avec pour point d’orgue la mort de Gavroche sur une barricade. Dans chacune des chansons, Moreau met en avant à la fois les différents épisodes de la répression sanglante des républicains depuis les Trois Glorieuses, dont il a été l’un des acteurs, et la pérennisation du souvenir des événements (29), pour la mémoire ouvrière et républicaine dont il défend la cause (30).
« Bons Parisiens, mes camarades,
Qu’est devenu après huit mois
La gloire de nos barricades ! […] »
« Halte dans la boue »,
extrait de la 1re strophe.
Les autographes d’Hégésippe Moreau vendus ces dix dernières années
De par leur petit nombre, les autographes de Moreau sont loin d’être fréquents en vente publique. Et cela n’est pas nouveau, Théophile Lhuillier le constate déjà à son époque (31), à plus d’un siècle de distance de la nôtre. Dans les faits, pour les dix dernières années nous n’avons pu retrouver que trois ventes ne proposant à chaque fois qu’un seul document ou presque. En voici la liste descriptive tirée des catalogues de vente.
La Chanson « Les Croix d’honneur »
Drouot Richelieu, salle 2, mercredi 25 mars 2009, 14 h., Gros & Delettrez Commissaires-priseurs, vente Autographes et Manuscrits. Lettres de Napoléon 1er.
« Lot n° 125. MOREAU Hégésippe (1810-1838). Ecrivain, Poète et journaliste. Poème manuscrit autographe intitulé "Les Croix d'honneur", formé de 36 vers avec ratures et corrections. Deux pages in-8°, effrangées et usées aux pliures. Les autographes d'Hégésippe Moreau, mort à 28 ans, sont rares. Est. : 300-500 euros (32). »
Résultat : 100 euros (33).
Cette chanson politique, dans laquelle Moreau brocarde la propension de la Monarchie de juillet à distribuer les plus hautes décorations avec complaisance pour s’attacher services et fidélités, est éditée par O. Vignon (34). Elle se chante sur l’air « Elle a trahi ses serments et sa foi », d’Eugène Scribe et il en existe plusieurs versions (35), plus ou moins polémiques (36). En voici un des couplets les plus poétiques :
« J’ai vu, quinze ans, tous les pouvoirs moqueurs
Pour leurs valets en faire une livrée ;
J’ai vu, quinze ans, des poitrines sans cœurs
S’enfler d’orgueil sous l’étoile sacrée. »
« Les Croix d’honneur »,
4e couplet.
Refrain : « Vieux chevaliers sans reproche et sans peur
En rougissant cachez vos croix d’honneur ! »
Un poème de cinquante-quatre vers
Drouot Richelieu, salle 4, mercredi 21 mars 20, 14 h., Hubert Brissonneau Commissaire-priseur,vente Autographes, livres, dessins et tableaux, bijoux, objets d’art, mobilier.
« Lot n° 3. [Hommes de Lettres]. Réunion d'autographes signés de vingt et un hommes de lettres. […] Hégésippe MOREAU, poème de 54 vers [titre non précisé].[…] Est. : 150-200 euros (37). »
Résultat : 120 euros (38)
Ce poème n’est malheureusement pas identifié.
Le poème « Diogène », avec les épreuves corrigées du texte
Drouot Richelieu, salle 2, mercredi 30 mai 2018, 14 h., Pierre Bergé & Associés, vente Livres & manuscrits.
« Lot n° 112. MOREAU Hégésippe (1810-1838). [Diogène] [1833]. Manuscrit autographe du poème "Diogène", avec les épreuves corrigées du texte. Manuscrit de 7 pages sur 5 feuillets in-8° et in-12° (environ 180 x 195mm), encre brune, quelques ratures et corrections. [Avec :] Diogène, fantaisies poétiques. Provins, 6 août 1833. Epreuves du quatrième numéro de cette revue, 8 pp. in-4°, nombreuses corrections autographes à l'encre ; 2 strophes autographes du poème "Noces de Cana", paru dans le même numéro, 1 p. in-12°. Cette revue fut publiée à compte d'auteur et parut en neuf livraisons. Est. : 300-600 euros (39). »
Résultat : 335 euros (40).
Le poème autographe « Diogène » dont il est question ici constitue la préface du premier numéro de la revue satirique en vers que lance Moreau en juillet 1833, sur le modèle de La Némésis de Barthélemy. « Diogène paraît chaque semaine, par livraison d’une feuille in-4° » peut-on lire à l’ours du premier numéro. Moreau vient tout juste de fêter son vingt-troisième anniversaire et il est de retour à Provins pour sa convalescence, après un premier séjour parisien qui a déçu ses espoirs de faire carrière et l’a rendu malade. Il compte bien rebondir à Provins où il compte encore de nombreux amis. Ces quelques vers résument parfaitement l’esprit et le propos du périodique :
« Diogène, fantaisie poétique (11 juillet 1833) »
« Du fond de son tonneau, tribune populaire,
Il exhalait sans peur sa maligne colère ;
La censure pour lui n’avait pas de bâillons,
Le glaive de la loi respectait ses haillons.
Au passant, dont l’aumône était sa nourriture,
En revanche il jetait quelque sot en pâture ;
Pour enivrer le peuple et consoler ses maux,
Comme un vin pur, sa tonne épanchait les bons mots.
Puis, son front soucieux, ridé par la satire,
Aux phalènes d’amour que sa lanterne attire
Souriait, et, narguant ses rivaux ébahis,
Il frottait sa laideur aux charmes de Laïs (41).[…] »
Mais l’expérience tourne court au bout de neuf numéros seulement. Le jugement de Sainte-Beuve sur la véritable aventure éditoriale éphémère que fut le Diogène de Moreau (42) est sans appel :
« Le talent qu’il y montra ne put sauver une telle publication partout très-aventurée, et qui l’était surtout au milieu des rivalités et des susceptibilités d’une petite ville. Il avait eu beau faire appel à toute la contrée de Brie et de Champagne, et s’écrier : “Qu’il me vienne un public ! ma poésie est mûre”, le public répondit peu. Le poète blessa et aliéna ceux même qui l’avaient d'abord soutenu. Il eut finalement un duel (43), et dut s’en revenir bientôt à Paris, désappointé de nouveau et irrité comme après un échec (44). »
Deux couplets de la chanson bachique « Les Noces de Cana »
Dans le même lot figurent deux couplets autographes (et non « strophes » comme le stipule le catalogue de vente), ou un couplet et le refrain, de la chanson « Les Noces de Cana (45) ». Là encore sans précision donnée à leur sujet par le vendeur, et sans que nos recherches nous permettent d’en préciser l’air qui devait être celui d’une chanson bachique ou grivoise, tant le ton en est égrillard tout au long de sept couplets. Qu’on en juge :
« De Cana l’on sait l’aventure,
Mais d’un vieux grimoire je tiens
Quelques détails, dont l’Écriture
N’a pas égayé les chrétiens.
Un peu gourmet, quoi qu’on en dise,
Le Bon Dieu, qui s’était grisé,
Se permit mainte gaillardise
Dont Judas fut scandalisé. […] »
« Les Noces de Cana »,
1er couplet.
Refrain : « Car chaque apôtre se signait
Et Judas surtout s’indignait :
Hélas ! disait-il, mes amis,
Le Bon Dieu nous a compromis. »
Le jeune Hégésippe écrit ce poème à dix-sept ans, au petit séminaire d’Avon où il est entré sans véritable vocation. Selon le témoignage du journaliste Gustave Claudin, qui ne l’appui sur aucune preuve (46), à la suite de cette inconvenance, « on chassa le séminariste [et] l’abbé de Lammenais, qui avait connu l’incident le défendit mollement (47). » Moreau est ensuite placé en apprentissage chez un imprimeur de Provins, cousin des Guérard.
Le poème « À l’occasion du passage de Charles X à Provins »
Galerie Thomas Vincent, 53 rue Sainte-Anne, 75002 Paris. Manuscrits et autographes. « MOREAU Hégésippe (1810-1838). Ecrivain et Poète français. Poème autographe, sans lieu ni date (1828), 1 page in-8°. Rarissime manuscrit d’Hégésippe Moreau. Il s’agit du brouillon de son poème intitulé "A l’occasion du passage de Charles X à Provins". Émouvant témoignage d’un des poètes “maudits” du XIXe siècle (48) ».
Fig. 2. L’autographe d’Hégésippe Moreau acquis sur le marché parisien par la SHAAP (Bibliothèque municipale de Provins, Fonds ancien, Dépôt SHAAP, © SHAAP/Ville de Provins).
Ce poème est écrit au recto d’un feuillet de papier vergé de 195 sur 155 mm, non signé, non daté. Il se compose de quatre quatrains :
« Grand Roi, daigne accorder un sourire à mon zèle,
Toi qui sur tous les arts as fait pleuvoir tes dons.
Le mien rend la gloire immortelle :
C’est le plus utile aux Bourbons.
« Par l’aspect d’un bon Roi dont la France s’honore,
Déjà Provins s’est ennobli ;
Maintenant, plus heureux encore,
Il voit le même jour Henri quatre et Sully.
« Partout, au nom du roi, l’enthousiasme brille,
Et les cœurs volent sur ses pas ;
Il a beau changer de climats,
Il est toujours dans sa famille.
« Français qui respectez l’honneur et le courage,
L’amour du bien public, la sagesse et la foi
A toutes ces vertus d’un mot rendez hommage,
Criez : Vive le Roi ! »
Un poème déclencheur pour Moreau et important pour l’histoire locale
Nous avons évoqué plus haut la chanson politique « Couplets inspirés par l’arrivée du Roi à Provins en septembre 1828 ». Elle est composée par Moreau le lendemain de la visite de Charles X (49). Mais pour en saisir la portée, il faut revenir à la chronologie des faits.
Pour satisfaire une demande officielle…
Pour cette circonstance exceptionnelle que constitue la visite d’un monarque, la municipalité demande à l’imprimerie Lebeau, où Moreau est apprenti, d’imprimer sur des transparents des quatrains de bienvenue au roi. « Lebeau se tourna vers Moreau qui commençait à taquiner la muse, rapporte Vignon, et lui demanda de composer ces strophes (50). » Le jeune homme s’acquitte de cette commande officielle, c’est le texte qui vient d’être acquis par la SHAAP, ou une de ses variantes. Il n’est pas possible de trancher la question faute d’autre matériau original à examiner. Toutes les éditions qui en ont été données jusqu’à présent semblent avoir utilisé la copie de Maximilien Michelin (BM Provins, Ms. 422, M. Michelin, « A l’occasion du passage de Charles X à Provins », copie autographe). Malheureusement, nul ne sait à partir de quelle source l’érudit a travaillé. Toujours est-il que le dernier quatrain est absent des Œuvres complètes et que, dans sa remarquable thèse, publiée à une date pourtant plus récente, Octave Vignon la publie, mais avec des variantes (51) et une erreur – il lit « joie » à la place de « foi » – en transcrivant mal la copie du Ms. 422 réalisée par M. Michelin.
Qui engendre une réponse politique engagée…
Nous connaissons les convictions républicaines de l’auteur52, elles s’expriment peut-être là pour la première fois, grâce ou à cause de cette commande, à dix-huit ans. Car au moment même où il répond à la double demande de son patron et du maire, il compose la chanson vengeresse « Vive le roi (53) !... » reproduite plus haut. Par cette double réponse, son engagement s’exprime de façon détournée ou quelque peu indirecte voire équivoque, mais tout de même suffisante pour qu’il se fasse remarquer de ses concitoyens. Cette chanson est un succès dans tout Provins. Cela le pousse sans doute à écrire une autre chanson, en empruntant le même air, « Dix-huit ans » :
« J’ai Dix-huit ans : tout change, et l’espérance
Vers l’horizon me conduit par la main,
Encore un jour à traîner ma souffrance,
Et le bonheur me sourira demain.
Je vois déjà croître pour ma couronne
Quelques lauriers dans les leurs du printemps
C’est un délire… Ah ! qu’on me le pardonne :
J’ai dix-huit ans (54) ! […] »
Cependant, pour le pouvoir local commence, sur un autre air, le temps de la mise sous surveillance (55) de Moreau poète subversif.
Et les débuts de la carrière littéraire de Moreau
Pour Jules Michelin en revanche, « c’est de ce jour que se révèle son talent (56). » O. Vignon confirme que l’actualité provinoise, de façon fort inattendue, fournit alors à Moreau « l’occasion de se révéler à lui-même, et de révéler au public, sa verve de poète satirique et ses talents de chansonnier (57). » On ne résiste pas au plaisir de reproduire ici les deux seules strophes qui nous sont restées de la chanson diffusée, quelques jours plus tard, en réaction à la réception donnée lors du passage à Provins, cette fois encore, de Madame la Dauphine :
« Comme à la messe,
Le sous-préfet marchait devant.
Il vint haranguer la princesse,
Les yeux baissés, le cœur fervent,
Comme à la messe.
Comme à la messe,
Autour du vieux sous-préfet
Chacun des employés s’empresse.
Ils baillaient tous, mais en secret,
Comme à la messe (58). »
La trop brève carrière du poète-chansonnier Provinois d’adoption commence donc surtout par des chansons et un peu plus d’an plus tard, au début de l’année 1830, Hégésippe Moreau quitte Provins pour Paris. Un avenir plein de promesse s’ouvre à lui dans la capitale : il est recommandé auprès du grand éditeur Firmin-Didot par un autre Provinois d’adoption, le poète et auteur dramatique Pierre Lebrun (59) !
Le destin des manuscrits de l’auteur du Myosotis n’est pas original. Il est à l’image de ce que l’on rencontre la plupart du temps après la mort d’un écrivain, « poète maudit » ou non : la dispersion de ses papiers littéraires. C’est pourquoi il est important de pouvoir mener une politique de regroupement où les achats prennent souvent le relais de dons antérieurs ou concomitants. L’acquisition que vient de réaliser la SHAAP a trait à un événement notable de l’histoire politique locale, qui marque les débuts littéraires de Moreau. On ne peut que s’en féliciter. Mais ce genre de politique pourra-t-il être mené encore longtemps ? Dans un article à destination du grand public, paru en 1979, Roger Pierrot, conservateur en chef du département des manuscrits de la Bibliothèque nationale dresse le bilan d’un siècle d’acquisitions à la Bibliothèque nationale. Il termine son propos ainsi :
« Comment en conclusion ne pas avoir l’impression d’être au début d’un âge d’or pour les collections littéraires de cette maison et pour les spécialistes du XIXe siècle et du début du XXe siècle ? C’est l’âge d’or de l’avant-texte, des brouillons, des variantes et repentirs, des études génétiques. Mais cet âge d’or durera-t-il avec les écrivains qui tapent directement leurs textes, jetant l’original couvert de ratures pour ne nous laisser que des « carbones » fragiles et moins corrigés ; durera-t-il avec les écrivains qui « disent » leur texte devant un magnétophone (60) ? ».
A l’heure de la micro-informatique et de l’ordinateur personnel, du texte saisi directement par l’auteur sur son PC, on ne peut qu’être interpelé par les résonnances de cette conclusion prémonitoire, à quelque quarante années de distance… et mesurer notre bonheur de trouver encore des manuscrits d’écrivains à acquérir pour nourrir la recherche en génétique des textes littéraires. S’il restait un souhait à formuler, minime il est vrai et en rapport avec le sujet qui nous occupe ici, ce serait celui de retrouver prochainement le texte complet de la chanson de Moreau « Comme à la messe », d’un esprit si « fin et malicieux (61) »…
Luc DUCHAMP, directeur du Musée, du Fonds ancien et des Archives de Provins (62)
Notes :
1. Sur le dépôt, voir le Bulletin de la Société d’histoire et d’archéologie de l’arrondissement de Provins, 2011, n° 165, p. 14, 43-46 (texte de la convention de dépôt) ; 2012, n° 166, p. 8-9.
2. Bibliothèque municipale de Provins, Fonds ancien, Dépôt de la Société d’histoire et d’archéologie de l’arrondissement de Provins (ensuite BM Provins, Dépôt SHAAP), Fonds Léouzon Le Duc, dossier « Hégésippe Moreau ».
3. Sur la vie et l’œuvre de Moreau, voir la thèse d’Octave VIGNON, Hégésippe Moreau : sa vie, son œuvre, préface de Jean Fabre, Provins, Société d’histoire et d’archéologie de l’arrondissement de Provins, coll. « Documents & travaux », II & III, 1966, 2 vol., 512 p.
4. Hégésippe MOREAU, Œuvres complètes de Hégésippe Moreau, introduction de René Vallery-Radot, Paris, Alphonse Lemerre, éditeur, 1890, t. I, Correspondance, contes, p. 12 sq.
5. O. VIGNON, op. cit., p. 328 sq.
6. Bibliothèque municipale de Provins, Fonds ancien (ensuite BM Provins), Ms. 422 (Collection Jules Michelin), dossier documentaire concernant Hégésippe Moreau.
7. Voir Hégésippe MOREAU, Le Myosotis, nouvelle édition précédée d’une notice biographique par M. Sainte-Marie Marcotte, augmentée d’un portrait littéraire de H. Moreau par M. Sainte-Beuve, de l’Académie française, et d’œuvres posthumes (poésies et lettres) recueillies et mises en ordre par M. Octave Lacroix, Paris, Paul Masgana, Libraire-Éditeur, 1851, p. XXXIV, note 1, dans laquelle O. Lacroix signale : « M. le docteur Michelin (de Provins) a mis à notre service son zèle infatigable, son goût sérieux et sa bienveillance. Mieux qu’un autre, il comprend et apprécie : nous lui devons d’intéressantes recherches et des notes curieuses ».
8. Hégésippe MOREAU, Œuvres complètes, op. cit., t. I, p. 7, et Théophile LHUILLIER, Hégésippe Moreau et son Diogène, Paris, Charavay frères, éditeurs, 1881, p. 26-27 et 32.
9. BM Provins, dépôt SHAAP, Fonds Léouzon Le Duc, lettres du journaliste Octave Lacroix par lesquelles il sollicite, pour le compte de l’éditeur Paul Masgana, la mise à disposition des notes et copies de lettres rassemblées par Maximilien Michelin pour son édition du Myosotis. En janvier 1839, M. Michelin obtient de Gervais, notaire à Provins, au moins une des deux lettres autographes que ce dernier a reçues de Moreau (voir l’édition qu’en donne R. Vallery-Radot in : H. MOREAU, Œuvres complètes, op. cit., t. I, p. 100-102).
10. Cf. les deux courtes notices bio-bibliographiques que leur consacre Alphonse Fourtier dans son Provins lettré : notes biographiques et bibliographiques, 2e édition, Provins, Lebeau, imprimeur-libraire, 1879, p. 92-97.
11. En 1881, Théophile Lhuillier (op. cit., p. 106), signale que « M. Jules Michelin (de Provins) possède deux lettres d’Hégésippe Moreau et quelques fragments manuscrits du Diogène ». Les autographes de Moreau appartenant à la SHAAP sont passés de Jules Michelin à son cousin Claude Charles Arthur Léouzon Le Duc (décédé en 1932) et il semble que ce soit sa fille qui en a fait indirectement don à la SHAAP, à une date que nous n’avons pu déterminer, via Odette Merlin qui en était dépositaire (sur l’entrée de la bibliothèque d’Odette Merlin dans le patrimoine de la SHAAP en 1984, voir Michel Veissière, « Rétrospective 1955-1985 : trente ans de vie de notre Société », Bulletin de la SHAAP, 1985-1986, n° 139-140, p. 7). A noter : la deuxième épouse de Jules Michelin, morte en 1920, est née Lebeau, de la famille des imprimeurs de Provins, employeurs de Moreau. Il n’est donc pas impossible que ce soit elle qui ait fait entrer tout ou partie des lettres de Moreau dans le patrimoine de la famille Michelin. Octave Vignon (op. cit., p. 327) semble avoir ignoré l’existence de ces lettres autographes dans son édition de la correspondance de Moreau qu’il a établie à partir des éditions partielles antérieures (cf. supra, notes 4 à 9), du catalogue de la vente de la Collection Alfred Dupont (Drouot, salle 7, vente des 18-19 juin 1957, lot n° 196 en particulier) et de la copie manuscrite d’Alphonse Fourtier (BM Provins, Ms. 423).
12. Bulletin de la SHAAP, 2018, n°172, p. 99.
13. Théophile LHUILLIER, op. cit., p. 104. Cf. le témoignage d’un des amis de Moreau, Alphonse Fourtier, dans la lettre écrite le 13 mai 1863 à Armand Lebailly, in : Hégésippe MOREAU, Œuvres inédites, avec introduction et notes par Armand Lebailly. Eau forte par G. Staal, Paris, Librairie Bachelin-Deflorenne, 1867, p. 122-124, note 5.
14. T. LHUILLIER, ibidem, p. 105-111.
15. O. VIGNON, op. cit., p. 453 (Collection Louis Rogeron).
16. Ibidem, p. 21-22.
17. Sur les circonstances de cette acquisition, cf. G. BENOIT-GUYOT, op. cit., p. 247-248, en complément de la notice du Ms. 393.
18. G. Benoît-Guyot (op. cit., p. 28) et, avant lui, A. Lebailly (in : H. MOREAU, op cit., p. 83-84) ont substitué « dévoué » à « respectueux » dans la formule finale : « très humble et très respectueux serviteur ».
19. T. LHUILLIER, op. cit., p.110-111.
20. BM Provins, Ms. 393, Catalogue du musée de Provins, [par Jules Desanlis, conservateur du musée et de la bibliothèque], 1947, p. 99, autographe n° 8.
21. O. VIGNON, op. cit., p. 49-50, note 20 (édition) et p. 453 (notice archivistique).
22. T. LHUILLIER, op. cit., p. 38 sq.
23. Ibidem., p. 221-222.
24. Ibid., p. 284-285.
25. Cet air n’est pas identifié, malgré les tentatives d’O. Vignon.
26. Voir à ce sujet : Sylvie APRILE, Jean-Claude CARON et Emmanuel FUREIX (dir.), La liberté guidant les peuples : les révolutions de 1830 en Europe, Seyssel, Champ Vallon, coll. « Époques », 2013, passim.
27. Sur les événements et leur portée politique, voir Thomas BOUCHET, « Le cloître Saint-Merry (5-6 juin 1832) : histoire d’un cheminement vers l’oubli, 1832-1862 », Revue d’histoire moderne et contemporaine, t. XLVII, n° 1, janvier-mars 2000, p. 114-119.
28. Victor HUGO, Les Misérables, préface de Charles Baudelaire, commentaires de Bernard Leuillot, Paris, Librairie Générale Française, collection « Le Livre de poche-Classique », 968, 1972, t. III., chap. XV « Gavroche dehors », p. 269-272.C'est en effet à la date du 6 juin que Victor Hugo fait s'interrompre tragiquement au pied des barricades le chant du petit Gavroche :
« Je suis tombé par terre,
C’est la faute à Voltaire,
Le nez dans le ruisseau,
C’est la faute à… »
29. Thomas BOUCHET, art. cit., p. 121 sq.
30. Sur les détails de la genèse de ces chansons, voir G. BENOIT-GUYOT, op. cit., p. 90-91, et O. VIGNON, op. cit., p. 220-223.
31. T. Lhuillier (op. cit., p. 109-110) relève déjà la faible occurrence des ventes :
« On est réduit à constater que trois pièces autographes seulement d’Hégésippe Moreau ont passé jusqu’ici en vente publique. "Le Dernier Jour", poésie, 2 pages in-fº, se trouvait dans une vente faite le 25 mai 1852 par M. Laverdet ; sa poésie "L’Apparition", datée de juillet 1833. Cette pièce est reproduite dans Le Myosotis avec la date du 3 août 1833., 2 pages in-4º, a été vendue avec la collection du docteur Coralli, à l’hôtel de la rue des Bons-Enfants, le 28 novembre 1866 ; enfin, l’ « Epître à M. Lebrun », — autographe et signée, — de 4 pages in-4º, a figuré le 19 février 1881 dans la vente de la collection de M. le baron de Marescot et a été acquise par M. Léonce Claverie. »
32. Opérateur de ventes volontaires (OVV) Gros & Delettrez, siège social : 2 rue Drouot, 75009 Paris, catalogue de la vente du 25 mars 2009. URL : <http://www.gros-delettrez.com/html/fiche.jsp?id=889272&np=&lng=fr&npp=150&ordre=&aff=&r=>(consulté le 16 août 2018).
33. OVV Gros & Delettrez, siège social : 2 rue Drouot, 75009 Paris, résultats de la vente du 25 mars 2009. URL : <http://www.gros-delettrez.com/html/fiche.jsp?id=889272&np=&lng=fr&npp=150&ordre=&aff=&r=>(consulté le 16 août 2018).
34. O. VIGNON, op. cit., p. 276-277.
35. Il est impossible, sans l’avoir vue, de dire quelle version a été proposée à la vente le 25 mars 2009.
36. O. VIGNON, op. cit., p. 219.
37. OVV Hubert Brissonneau commissaire-priseur, siège social 4 rue Drouot, 75009 Paris, catalogue de la vente du 21 mars 2018. URL :
<http://www.brissonneau.net/html/index.jsp?id=89372&np=1&lng=fr&npp=50&ordre=1&aff=1&r=#lot3> (consulté le 16 août 2018).
38. OVV Hubert Brissonneau commissaire-priseur, siège social 4 rue Drouot, 75009 Paris, résultats de la vente du 21 mars 2018. URL :
<http://www.brissonneau.net/html/fiche.jsp?id=8569453&np=1&lng=fr&npp=50&ordre=1&aff=&r=> (consulté le 16 août 2018).
39. Ibid., OVV Pierre Bergé & Associés, siège social : 92, avenue d’Iéna, 75116 Paris, catalogue de la vente du 30 mai 2018. URL :
<http://www.pba6auctions.com/html/fiche.jsp?id=8848893&np=&lng=fr&npp=150&ordre=&aff=&r=> (consulté le 16 août 2018).
40. Ibid., OVV Pierre Bergé & Associés, siège social : 92, avenue d’Iéna, 75116 Paris, résultats de la vente du 30 mai 2018. URL :
<http://www.pba6auctions.com/html/fiche.jsp?id=8848893&np=&lng=fr&npp=150&ordre=&aff=&r=> (consulté le 16 août 2018).
41. H. MOREAU, Œuvres complètes, op. cit., t. II, p.36-37.
42. Pour tout ce qui se rapporte au Diogène, là encore, se reporter au livre d’O. Vignon, qui présente le dossier le plus complet, p. 63-66 et 379-399.
43. Moreau est en effet provoqué en duel, le 26 août 1833 à Provins, par un clerc d’avoué, Victor Plessier pour ne pas le nommer, futur député (sur cet épisode de la vie de Moreau, voir Louis ROGERON, « Un duel historique », Feuille de Provins, 70e année, n° 30, 26 juillet 1884, p. 1-2, et O. VIGNON, op. cit., p. 65, note 5).
44. Charles-Augustin SAINTE-BEUVE, Causeries du lundi, 4e édition, Paris, Garnier frères, libraires-éditeurs, 1883, p. 61.
45. Publié, dès 1838, dans la première édition (posthume) du Myosotis : H. MOREAU, Le Myosotis, petits contes et petits vers, Paris, Desessarts, éditeur, 1838, p. 255-258.
46. Cette présentation des faits est contestée par O. Vignon (op. cit., p. 38, note 14).
47. Gustave CLAUDIN, Mes souvenirs : les boulevards de 1840-1870, 4e édition, Paris, Calmann Lévy, éditeur, 1884, p. 3.
48. Voir l’annonce en ligne de la Galerie Thomas Vincent, 53 rue Sainte-Anne, 75002 Paris. Manuscrits et autographes. URL : <http://www.galeriethomasvincent.fr/582-moreau-hegesippe-autographe.html> (consulté le 16 août 2018).
49. Sur le passage de Charles X à Provins, cf. BM Provins, Ms. 422 ; Jules Michelin, « Charles X à Provins », Feuille de Provins, 53e année, n° 38, 21 septembre 1867, p. 2-3 ; et « Vie de la Société. Au musée du Provinois à la Maison romane : présentation de nouveaux objets », par Marcel Bellot, Bulletin de la Société d’histoire et d’archéologie de l’arrondissement de Provins, 1985-1986, n° 139-140, p. 27-30.
50. O. VIGNON, op. cit., p. 48-49.
51. Voir H. MOREAU, Œuvres complètes, op. cit., t. II, p. 268 : 2e strophe « Aujourd’hui » à la place de « Maintenant », et « justice » en lieu et place de « sagesse » à la dernière strophe.
52. Cf. la synthèse proposée autour des débats sur la réalité de l’engagement politique de Moreau in : Claudine DE LA MATA, Gilbert, Malfilâtre, Hégésippe Moreau et quelques autres poètes maudits…, thèse pour le doctorat de 3e cycle, Littérature française, sous la direction de Georges Mailhos, Université de Toulouse Le Mirail, UER de Lettres modernes, octobre 1985, chapitre 3.
53. Sur l’enchaînement des faits, voir O. VIGNON, op. cit., p. 50 et 430.
54. Le texte complet, avec la notation musicale, est édité par O. Vignon (op. cit., p. 282-283).
55. Voir le pli du dossier Mdz 334 des Archives départementales de Seine-et-Marne et les épisodes tragi-comiques rapportés par les biographes de Moreau, dont O. Vignon (op. cit., p. 272-275).
56. J. MICHELIN, art. cit., p. 2.
57. O. VIGNON, op. cit., p. 51. Pour plus de détails sur les chansons de Moreau, se reporter surtout à la troisième partie de la thèse d’O. Vignon (op. cit., p. 199-237).
58. Ibidem, p. 49.
59. Sur les rapports entretenus par Moreau et Lebrun, consulter O. Vignon (op. cit.,passim). Sur son œuvre littéraire, voir la notice que lui consacre Sainte-Beuve in : Pierre LEBRUN, Œuvres de Pierre Lebrun, de l’Académie française, Paris, Perrotin, libraire-éditeur, 1894, t. I, p. I-XXXVIII.
60. Roger PIERROT, « Les écrivains et leurs manuscrits : remarques sur l’histoire des collections modernes », Bulletin de la Bibliothèque nationale, 4e année, n° 4, décembre 1979, p. 177.
61. Le jugement est d’Octave Vignon (op. cit., p. 49).
62. Article mis en ligne le 17 juillet 2020 et initialement publié dans le Bulletin de la Société d’histoire et d’archéologie de l’arrondissement de Provins, 2018,n° 172, p. 49-59.
Sources et bibliographie
I.
1. Manuscrits de la Bibliothèque municipale de Provins, Fonds ancien, Ms. 422 (Collection Jules Michelin), dossier documentaire concernant Hégésippe Moreau.
1.1 Autographes de Moreau :
Lettre autographe signée par laquelle H. Moreau, âgé de dix ans, invite Émile Guérard à la distribution des Prix de l’Institution Communale [collège] de Provins. Document signalé par O. Vignon comme appartenant, à l’époque de sa thèse, aux collections du Musée municipal (op. cit., p. 456). Ce que confirme la consultation du catalogue du musée dont une partie des collections se trouvaient encore, avec la Bibliothèque au jardin Garnier (BM Provins, Ms. 393, Catalogue du musée de Provins, [par Jules Desanlis, conservateur du musée et de la bibliothèque de Provins], 1947, p. 99, autographe n° 1).
« Couplets inspirés par l’arrivée du Roi à Provins », chanson autographe signée « Par un Provinois »– « une des premières copies de l’œuvre » selon O. Vignon (op. cit., p. 453) –, s.d. [1828], encre très pâle (cataloguée in : BM Provins, Ms. 393, p. 99, autographe n° 7).
Depuis les années 1970, les autographes de Moreau appartenant à la Ville de Provins sont classés, avec les autres manuscrits le concernant (collections Michelin père et fils, Bourquelot, Fourtier-Moret, etc.), sous la cote Ms. 422.
1.2 Autres manuscrits :
« Cantique du missionnaire », une des toutes premières chansons de Moreau.
Lettre autographe signée (L.A.S.) adressée par Camille-Nicolas Guérard, le protecteur d’H. Moreau, à Félix Bourquelot, professeur à l’École des Chartes, le 6 février 1854, dans laquelle la vie de Moreau est racontée avec fidélité.
Notes de Maximilien Michelin et de Félix Bourquelot sur la visite de Charles X à Provins le 18 septembre 1828.
La Bibliothèque municipale conserve encore un autre ensemble de notes manuscrites concernant H. Moreau, celui constitué par le bibliographe provinois Alphonse Fourtier., qui a été entièrement relié dans les années 1970-80 avec l’exemplaire du Myosotis de Moreau édité à Paris par Paul Masgana en 1851. Ce volume truffé comporte un envoi manuscrit de l’éditeur à Sainte-Beuve sur la première de couverture : « A Monsieur Sainte-Beuve, ma reconnaissance et mes remerciements, P. Masgana. ». Coté Ms. 423, il comprend pour l’essentiel une copie de toutes les lettres de Moreau connues de Fourtier (32 f.), quelques œuvres inédites (20 f.) et un recueil de pièces de vers écrites en l’honneur de Moreau (12 f.) par Arsène Houssaye, Pierre Lachambeaudie, Armand Lebailly, Pierre Dupont, Jean-François Destigny, Bathild Bouniol, Philippe de Gaubert…
2. Manuscrits de la Bibliothèque municipale de Provins, Fonds ancien, Dépôt de la Société d’histoire et d’archéologie de l’arrondissement de Provins, Fonds Léouzon Le Duc, Dossier « Hégésippe Moreau » :
2.1 Autographes de Moreau L.A.S. adressée, de Paris, à « Monsieur Lebeau fils, chez M. son père, imprimeur-libraire à Provins », datée de début février 1830, éditée partiellement par O. Vignon (op. cit., p. 329, n° 4), et intégralement par R. Vallery-Radot, in : H. MOREAU, Œuvres complètes, p. 32-33.
L.A.S. adressée, de Paris, à « Monsieur Lebeau fils, chez M. son père, imprimeur-libraire à Provins », datée de fin mars ou début avril 1830, éditée par O. Vignon (op. cit., p. 331, n° 7), et R. Vallery-Radot, in : H. MOREAU, Œuvres complètes, p. 37-40.
L.A.S. adressée, de Paris, à « Monsieur Lebeau fils, chez M. son père, imprimeur-libraire à Provins », datée du 13 avril 1830, éditée par O. Vignon (op. cit., p. 337, n° 18), et R. Vallery-Radot, in : H. MOREAU, Œuvres complètes, p. 57-59.
L.A.S. adressée, de Paris, à « Monsieur Lebeau fils, imprimeur-libraire à Provins », datée du 11 juillet 1831, éditée partiellement par O. Vignon, (op. cit., p. 340, n° 22), et intégralement par R. Vallery-Radot, in : H. MOREAU, Œuvres complètes, p. 68-71.
L.A.S. adressée, de Paris, à « Monsieur Lebeau fils, imprimeur-libraire à Provins », datée du 9 septembre 1831, éditée partiellement par O. Vignon (op. cit., p. 341, n° 24 a). Absente des Œuvres complètes.
L.A.S. adressée, de Paris (n° 56, Faubourg Saint-Denis), à Monsieur Gervais, à Provins, datée de novembre 1833, éditée très partiellement par O. Vignon (op. cit., p. 346, n° 33), et intégralement par R. Vallery-Radot, in : H. MOREAU, Œuvres complètes, p. 100-102.
L.A.S. adressée, de Paris, à « Monsieur Gervais, Notaire et Propriétaire à Provins », datée du 16 juillet 1834, éditée par O. Vignon (op. cit., p. 348, n° 37), et R. Vallery-Radot, in : H. MOREAU, Œuvres complètes, p. 108-109.
2.2 Autres manuscrits (inédits)
L.A.S., en forme de certificat, par Aglaée Souclier, institutrice à Provins, à l’intention de Marie Rouillot, mère d’Hégésippe Moreau, au sujet des aptitudes scolaires de ce dernier, s.l. [Provins], s.d. [1815].
L.A.S. par Gervais, notaire à Provins, adressée à « Monsieur [Maximilien] Michelin, docteur en médecine, à Provins », le 23 janvier 1839, concernant les deux lettres autographes qu’il a reçues de Moreau.
L.A.S. par Octave Lacroix adressée, de Paris, à Maximilien Michelin, datée du 9 mars 1851.
L.A.S. par Octave Lacroix adressée, de Paris, à Maximilien Michelin, datée du 8 avril 1851.
L.A.S. par Octave Lacroix adressée, de Paris, à Maximilien Michelin, datée du 22 avril 1851.
L.A.S. par Octave Lacroix adressée à Maximilien Michelin, s.l. [Paris], s.d. [1851], au moment des corrections des dernières épreuves du Myosotis édité par P. Masgana.
3. Imprimés utilisés pour cet article
Hégésippe MOREAU, Le Myosotis, petits contes et petits vers, Paris, Desessarts, éditeur, 1838, 329 p.
Hégésippe MOREAU, Le Myosotis, nouvelle édition précédée d’une notice biographique par M. Sainte-Marie Marcotte, augmentée d’un portrait littéraire de H. Moreau par M. Sainte-Beuve, de l’Académie française, et d’œuvres posthumes (poésies et lettres) recueillies et mises en ordre par M. Octave Lacroix, Paris, Paul Masgana, Libraire-Éditeur, 1851, LVI-259 p.
Hégésippe MOREAU, Œuvres inédites, avec introduction et notes par Armand Lebailly. Eau forte par G. Staal, Paris, Librairie Bachelin-Deflorenne, 1867, 126 p.
Jules MICHELIN, « Charles X à Provins », Feuille de Provins, 53e année, n° 38, 21 septembre 1867, p. 2-3.
Alphonse FOURTIER, Provins lettré : notes biographiques et bibliographiques, 2e édition, Provins, Lebeau, imprimeur-libraire, 1879, IV-132 p.
Théophile LHUILLIER, Hégésippe Moreau et son Diogène, Paris, Charavay frères, éditeurs, 1881, 114 p. Cet in-32 particulièrement rare, tiré à 392 exemplaires (5 sur Japon, 12 sur Chine, 25 sur Hollande et 350 sur vélin mécanique teinté), à Paris sur les presses de la Société typographique, est consultable en ligne, (URL : <https://archive.org/details/hgsippemorea00lhui>) et un des exemplaires sur vélin teinté (n° 121), ayant appartenu à Odette Merlin, se trouve dans le Fonds de la SHAAP déposé à la Villa Garnier.
Charles-Augustin SAINTE-BEUVE, Causeries du lundi, 4e édition, Paris, Garnier frères, libraires éditeurs, 1883, t. IV, 586 p.
Gustave CLAUDIN, Mes souvenirs : les boulevards de 1840-1870, 4e édition, Paris, Calmann Lévy, éditeur, 1884, 349 p.
Hégésippe MOREAU, Œuvres complètes de Hégésippe Moreau, introduction de René Vallery-Radot, Paris, Alphonse Lemerre, éditeur, 1890, 2 vol., 311 et 328 p.
Pierre LEBRUN, Œuvres de Pierre Lebrun, de l’Académie française, Paris, Perrotin, libraire-éditeur, 1894, t. I, XXXVIII-421 p.
Georges BENOIT-GUYOT, La vie maudite d’Hégésippe Moreau, Paris, Éditions Jules Tallandier, 1945, 249 p.
Octave VIGNON, Hégésippe Moreau : sa vie, son œuvre, préface de Jean Fabre, Provins, Société d’histoire et d’archéologie de l’arrondissement de Provins, coll. « Documents & travaux », II & III, 1966, 2 vol., 512 p.
Victor HUGO, Les Misérables, préface de Charles Baudelaire, commentaires de Bernard Leuillot, Paris, Librairie Générale Française, collection « Le Livre de poche-Classique », 964-966-968,1972, 3 vol., XVII-494-573-573 p.
Roger PIERROT, « Les écrivains et leurs manuscrits : remarques sur l’histoire des collections modernes », Bulletin de la Bibliothèque nationale, 4e année, n° 4, décembre 1979, p. 165-177.
Michel VEISSIÈRE, « Vie de la Société. Rétrospective 1955-1985 : trente ans de vie de notre Société », Bulletin de la Société d’histoire et d’archéologie de l’arrondissement de Provins, n° 139-140, 1985-1986, p. 5-8.
Marcel BELLOT, « Vie de la Société. Au musée du Provinois à la Maison romane : présentation de nouveaux objets », Bulletin de la Société d’histoire et d’archéologie de l’arrondissement de Provins, 1985-1986, n° 139-140, p. 27-30.
Claudine DE LA MATA, Gilbert, Malfilâtre, Hégésippe Moreau et quelques autres poètes maudits…, thèse pour le doctorat de 3e cycle, Littérature française, sous la direction de Georges Mailhos, Université de Toulouse Le Mirail, UER de Lettres modernes, octobre 1985, IV-264-10-VI-7 p.
Thomas BOUCHET, « Le cloître Saint-Merry (5-6 juin 1832) : histoire d’un cheminement vers l’oubli, 1832-1862 », Revue d’histoire moderne et contemporaine, t. XLVII, n° 1, janvier-mars 2000, p. 113-130.
Sylvie APRILE, Jean-Claude CARON et Emmanuel FUREIX (dir.), La liberté guidant les peuples : les révolutions de 1830 en Europe, Seyssel, Champ Vallon, coll. « Époques », 2013, 329 p.