Werner Lange a écrit ces « mémoires » avant de se pendre.áC'était un officier allemand francophile et cultivé. Les êtresáqu'il évoque sont des monuments de l'histoire de l'art dont lesáchefs-d'oeuvre ornent les collections des plus grands musées. Maisáce sont aussi des hommes et des femmes qui collaborent avec l'occupant pour continuer à peindre, à exposer, à mieux mangerátout simplement. Le caractère captivant de ces pages réside dans l'anecdotique,ále quotidien, le « banal » de la vie de nos génies des arts sousál'occupation. C'est ce côté indécent, « people » presque qui rendáles souvenirs de Werner Lange si uniques. Le fait que les chosesásoient racontées par un officier de la Propagandastaffel pétriád'admiration pour les artistes dont il doit « s'occuper », donneáau récit une intensité rare. L'amitié sincère qui le lie à Maillol,áà Vlaminck, à Dina Vierny, ses relations intimes avec Derain,áson dîner avec Picasso dans un clandé du marché noir, donnentálieu à des scènes inédites d'une richesse à laquelle peu de livresád'histoire peuvent prétendre. Le don de conteur, l'acuité bienveillante du regard de ce témoináplongé dans un milieu fascinant à une époque particulièrementádramatique de l'histoire de France, tout cela fait qu'on litáles « mémoires » de Werner Lange comme on regarde unáfilm.