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Sous un toit de chaume : redécouverte de deux crèches en terre cuite glaçurée du XVIIe siècle

L’étude du groupe de la Nativité entré dans les collections , et restauré au Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France (C2RMF) en 2024, permet de mettre en valeur une œuvre similaire, elle aussi inédite, conservée au musée de Provins et du Provinois (inv. MP 1965). Bien qu’illustrant une iconographie très commune en peinture et en sculpture depuis le Moyen Âge, ce type d’objet de petit format, réunissant des figurines en ronde bosse de la Sainte Famille dans un édifice, est exceptionnel en France au XVIIe siècle dans la production céramique, et même plus généralement dans le domaine des objets d’art. Il s’agit bien d’une « crèche » au sens contemporain du terme, c’est-à-dire une mise en scène miniature de la Nativité en trois dimensions. Le terme, d’origine germanique (de l’ancien bas francisque krippia), signifie à l’origine la « mangeoire » pour les bestiaux, mais aussi celle où le Christ fut déposé au moment de sa naissance d’après l’Évangile selon Luc (Luc 2:7, 12, 16), puis par métonymie le lieu lui-même, l’étable ou la grotte.

De dimensions presque similaires à celle du Louvre, la crèche de Provins se distingue par un nombre plus important de statuettes fixées sur la terrasse et par une gamme chromatique légèrement différente, à dominante brun-rouge et jaune. Le toit de l’édifice, dont les fines ondulations incisées évoquent la paille, prend ici une forme d’arc brisé aplati. Aux mêmes figures s’ajoutent un agneau, couché à l’avant du berceau, et le bœuf ; leurs têtes cassées ont été restituées au XIXe siècle (?) avec un mastic ou un plâtre grossièrement modelé. Si les statuettes de Joseph et des bergers semblent être des tirages à partir de moules identiques à celles de la crèche du Louvre, ce n’est pas le cas de la Vierge, plus petite et debout. Les ailes de l’ange sont également dans une autre position. Enfin, la paroi rocailleuse à l’intérieur offre un décor moulé différent. Tout comme sa « cousine » du Louvre, la crèche du musée de Provins et du Provinois vient d’être restaurée par le C2RMF et va très prochainement trouver sa place dans une vitrine de la Maison romane. Probablement exécutés à Paris ou en Île-de-France dans la première moitié du XVIIe siècle, ces objets en terre cuite glaçurée sont des témoins exceptionnels de la dévotion privée et font certainement partie des plus anciennes « crèches » domestiques conservées en France, voire en Europe.

 

Bibliographie (pour en savoir plus) :

- Françoise BARBE, Luc DUCHAMP, Patricia DUPONT-AULAGNIER, « Sous un toit de chaume : redécouverte de deux crèches en terre cuite glaçurée du XVIIe siècle», La Revue des musées de France. Revue du Louvre, 4e trimestre 2024, p. 58-69, p. 58-69.

- Françoise BARBE, Anne BOUQUILLON, Thierry CRÉPIN-LEBLOND, Aurélie GERBIER (dir.) Bernard Palissy : nouveaux regards sur la céramique française aux XVIe et XVIIe siècles, numéro thématique de la revue Technè : la science au service de l’histoire de l’art et des civilisations, numéro 47, 2019, 265 p., en ligne

 

Légende des illustrations : Paris, ou Île-de-France. Nativité, ou crèche en forme de chaumière. Vers 1600-1650. Terre cuite glaçurée. H. 0,24 ; L. 0,36 ; Pr. 0,243. Provins. Musée de Provins et du Provinois. Inv. MP 1956.

A : Vue de face. © C2RMF / Ville de Provins

B : Revers. © C2RMF / Ville de Provins